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28 novembre 2023 2 28 /11 /novembre /2023 14:45
Sauver les meubles et les livres

La fin de l'histoire ? Ça dépend pour qui

La fin de l'histoire a-t-elle sonné ? Pour certains politologues avertis, l'économie de marché, ou plus banalement capitalisme, et la démocratie libérale, devraient désamorcer tous les nationalismes pour ne faire d'un monde post-historique en devenir qu'un vaste village planétaire, sans frontières ni passeports[1]. Dans cette optique, les vastes transhumances humaines ont une grande utilité. L'Union Européenne efface les frontières entre ses vieilles nations indigènes, et les grandes migrations depuis l'Afrique notamment brassent les populations du plus clair des blonds au plus foncé des bruns pour tendre à ne faire qu'une seule race au sein de l'espèce humaine. Tout ceci est de façon hypothétique et utopique une très noble aspiration. Vous avez des tubes de peinture ? Ou alors vous en aviez en cours de dessin : bleu, rouge, jaune, blanc, noir… quel casse-tête! Inspirez-vous des adeptes de la posthistoire. Videz tous vos tubes dans un bol et mélangez bien tous leurs contenus. Vous atteindrez une couleur indéfinissable et votre expérience vous servira de parabole pour comprendre tous les bienfaits de la fin des nations et des frontières, à moins que vos goûts, indiscutables comme on le sait, ne se retrouvent dans cette couleur déjectionnelle.

Si, au niveau des langues, les barrières qui séparent les groupes risquent d'être plus difficiles à faire tomber, d'autant que l'espoir de l'espéranto n'a rien donné, un appareil moderne y remédie : compact, portatif, rappelant le dictaphone, il vous autorise à parler dans n'importe quelle langue pour le tendre en fin de phrase à n'importe quel interlocuteur parlant n'importe quelle autre langue. Votre parole est répétée dans la langue d'arrivée et celle de la réponse à l'arrivée dans votre langue de départ ; en attendant le modèle de la génération suivante qui permettra de converser avec les animaux, quand les mots seront traduits en grognements divers et les grognements en mots.

La fin de l'histoire préfigure donc un monde protohistorique, tel que le décrit la section hebdomadaire de Noé, quand, jusqu'à la tour de Babel, tout le genre humain ne parlait qu'une seule langue, avant que l'Eternel ne mélange leurs langages, ou ne les embrouille. Balal, en langue biblique, signifie mélanger ; Bil-bel embrouiller. On relèvera une curiosité : le quartier de Belleville, à Paris, où toutes les langues se rencontrent et se fondent les unes dans les autres.

Ce rêve planétaire est précurseur de paix. Tout le monde s'y retrouve. Les Occidentaux qui le préconisent, et qui ne voient qu'un seul produit humain matérialiste – que l'on n'appelle plus trop consommateur – dont les seules motivations sont confort et/ou profit, et les adeptes d'un islam conquérant, qui ne voient qu'une seule nation – ouma – avec une seule religion. Abattre les frontières permet aux esprits postmodernes partisans de la posthistoire de se fondre en une idéologie de terrain commune avec la tendance islamisante. Ce moteur religieux ne gène pas trop l'homme postmoderne, car il faudra et il suffira, le moment voulu, d'y renoncer.

Les déplacements de populations, imposés ou voulus par elles, désamorcent les aspirations nationalistes de deux façons contradictoires. Soit le groupe déplacé ne se sent plus d'attaches ou de racines dans son nouveau terroir, où il se fera une nouvelle identité fondue dans la masse qui l'a précédé – on sait que les nationalismes gênent les classes dirigeantes depuis des temps immémoriaux : Sennachérib déplaça les nations d'un territoire à l'autre, dont les dix tribus d'Israël au-delà du fleuve Sambatyon ; tandis qu'avant lui Tsfanat Pa'anéa'h en Égypte transféra les populations d'une contrée à l'autre – soit il se fait trop imposant dans un lieu qui déborde de ses frontières d'origine, auquel cas il y sera ramené comme les Sudètes à la fin du conflit mondial.

En tout état de cause, les Sages d'Israël nous conseillent de prier pour la stabilité de l'autorité, sans quoi chacun ne ferait qu'une bouchée de son prochain, et la loi du plus fort redeviendrait comme toujours la meilleure. Aux USA, pour ne pas être soumis à des hordes sauvages, des citoyens se constituent en résidences fermées lourdement protégées. Faire du monde entier un immense village n'apporterait donc pas la paix mais la nécessité de se constituer en groupes donc en nations pour échapper à l'anarchie et à la loi de la jungle. La posthistoire devient donc protohistorique. Quoique, en attendant, en le disant vite, on peut se laisser bercer par l'idée de l'utopie précitée d'un seul pays planétaire pour un seul peuple qui l'est aussi.

Un village planétaire ? Pas pour tout le monde

A ce titre, le peuple juif peut être perçu sous deux angles contradictoires. Il peut infirmer ce qui précède : dans chaque pays, le groupe juif n'était pas possesseur d'un territoire et il avait adopté la langue environnante, ce qui à petite échelle peut montrer que ni l'absence de frontières spécifiques ni le parler généralisé ne solutionne les problèmes de nature conflictuelle posés par l'histoire ; ou illustrer l'exception qui confirme la règle : le Juif, contrairement aux autres nations, doit indispensablement disposer d'un pays, de frontières sûres et reconnues, et de sa propre langue et même écriture. Les deux approches diamétralement opposées parviennent à la même conclusion : le Juif a besoin de son propre pays.

D'ailleurs, vouloir tenter dans le microcosme israélien l'expérience du macrocosme mondial est extrêmement dangereux : laisser cohabiter des antisémites sur le même territoire, peut donner ce que l'on a vu le 7 octobre 23, et rien ne garantira qu'un tel désastre ne sera pas répété tant que les populations hostiles séjourneront sur le même sol, car distinguer Gaza du Néguev Occidental comme s'il s'agissait de deux contrées distinctes est un mensonge que la réalité ne supporte pas.

L'Etat n'est pas qu'une formalité

On a voulu croire que le seul fait d'avoir un Etat indépendant et suffisamment puissant pour se défendre suffirait à lui seul à changer radicalement la donne. La seule existence d'Israël devait garantir la sécurité de ses citoyens et prévenir les attaques antijuives, puisque l'on pose comme axiome que le Juif ne serait attaqué que privé de la possibilité de se défendre et/ou de contrattaquer, de poursuivre jusque dans leurs derniers retranchements les commanditaires et les exécutants des pires exactions le cas échéant, comme dans les affaires des athlètes de Munich ou des collégiens de Ma'aloth.

On a donc voulu considérer que les Juifs auraient eux aussi droit à leur posthistoire. Il faut et il suffit pour eux d'avoir à titre exceptionnel un pays. Ainsi, ils seront protégés et ne se laisseront plus conduire tel un troupeau de moutons à l'abattoir. Quand l'Égypte, la Syrie et/ou la Jordanie, se laissent séduire par la tentation nazie – n'oublions pas qu'ils n'ont pas déposé les armes – ils s'en mordent les doigts et leurs vaillants guerriers retournent à l'état sauvage en couvrant le désert de rangers, préférant courir pieds nus.

Pour les Juifs, la posthistoire, c'est le temps qui intervient après leur long exil. Pour un peu, on pourrait parler de messianisme laïc. On fait comme si leur posthistoire durait déjà depuis 75 ans, ce qui est peu, au regard de presque deux mille ans d'exil et d'errance, malgré des périodes d'âge d'or dont il fallait vite profiter comme du calme avant la prochaine tempête. L'erreur fatale est de croire que l'indépendance recouvrée impliquerait simultanément le recyclage des armes en socs de charrues.

Messianisme laïc

Le messianisme laïc avance plus vite en besogne que le messianisme religieux traditionnel. Pour lui, la rédemption se fait en un jour, du malheur au soulagement, etc. Ce n'est pas pour rien – sans vouloir offenser personne – que le jour du souvenir dédié aux victimes du terrorisme arabe et aux héros tombés au combat est le 4 du mois de yar, soit la veille du jour d'Indépendance.

 Si la pensée juive prévoit un long processus de rédemption, qui commence telle la gazelle du matin, synonyme de l'aube, pour reprendre la formule talmudique, quand, après les ténèbres les plus profondes, un léger rayon de lumière à peine perceptible point à l'horizon, avant de se faire de plus en plus sensible et présent, le messianisme laïc a tout de suite été inondé d'un sentiment de puissance, d'invincibilité, et d'irréversibilité, à tel point que toutes les menaces ennemies ne pouvaient être que risibles et surannées, et produire un dangereux sentiment de condescendance envers le mal, et ce dès après la guerre de 48.

Ne vois-tu donc rien venir ? Eh non ! Toute nouvelle menace est reléguée à une situation révolue de sorte que tout auteur de menace ne peut être perçu que sous la forme d'un voyageur temporel qui n'aurait pas compris qu'il a été propulsé à une époque qui n'est plus la sienne, un peu comme si on voyait débarquer un homme préhistorique armé d'un lourd gourdin.

L'Israélien moderne laïc s'est senti tellement au-dessus de tout cela, qu'il s'est mis à prendre en pitié ces pauvres antisémites qui ne peuvent plus rien contre nous. Yech lanou Tsava 'hazak. Nous avons une puissante armée.

Le sentiment de vivre dans un monde de posthistoire fait percevoir comme préhistorique le danger de l'ancien monde. Le nouveau Juif – forcément puisque l'ère est nouvelle – est si certain dans son approche que non seulement il ne craint plus que l'histoire ne déborde par sa force d'inertie qu'il baisse sa garde, au point de se persuader que c'est à lui de ne pas faire aux antijuifs ce que les nazis ont fait aux Juifs. Ce n'est pas que de la philosophie théorique et coupée du monde. Elle a laissé son empreinte tenace qui a rendu vulnérable l'Etat d'Israël par la promulgation très concrète d'une loi israélienne contre le racisme. Quel racisme ? Pas celui pourtant toujours latent et menaçant de non-Juifs qui n'auraient pas renoncé à leurs aspirations génocidaires à l'endroit des Juifs, toutes tendances confondues : nazisme; islamisme, inquisitionnisme, croisismes, titussisme… (Curieux ce correcteur d'orthographe, il ne reconnaît que les deux premiers).  Non, le racisme éventuellement possible du Juif contre les autres, puisque, depuis l'avènement du messianisme laïc, le monde n'est plus le même.

Et si ceux qui ne nous aiment pas malgré tout, parce qu'ils n'ont pas senti la transition vers ce monde nouveau, ceux qui débitent encore les pires diatribes à notre égard, nous les éduquerons et éviterons de répondre à leur rancœur par de la haine. Nous leur expliquerons tout le bien et tout le profit qu'ils pourront tirer de la coexistence. Nous les aiderons à se remettre de leurs fantasmes néfastes. Maintenant, s'il reste des traces de ce passé révolu, s'il reste envers et contre tous des terroristes, nous les traiterons avec toute la rigueur qui s'impose.

Messianisme traditionnel

De son côté, le messianisme juif traditionnel est plus prudent. Cette fierté d'être sortis de la période de l'exil si galvanisante qu'il ne saurait être question d'une menace que les Arabes feraient reposer sur nous en prenant le relais des Allemands, cette illusion qui inverse la donne et nous dicterait la prudence – ne faisons pas aux Arabes ce que les Allemands nous ont fait – ne risque pas de faire perdre pied aux Juifs fidèles à leur tradition. Dans les Lois des rois, Maïmonide énonce noir sur blanc que la première besogne du pouvoir juif, pour ne pas dire du rédempteur terrestre, sera en temps voulu de conduire une guerre sans concessions aux forces opposantes, qui se réveilleront et mettront tout le paquet dans leur tentative de faire échouer la rédemption.

Mais le messianisme laïc est si tenace qu'il s'acharne à mettre hors d'état de sauver et non de nuire tout lanceur d'alerte qui, au lieu d'être compris comme un révélateur du danger, est accusé de susciter par son extrémisme politique la haine des autres contre nous. Outre les considérations électoralistes et la volonté de ne pas se faire doubler sur la droite, les partis sont unanimes pour faire taire et interdire tout candidat soupçonné de racisme. On a donc développé en Israël une culture du silence et complexé quiconque s'insurgerait contre les intentions d'anéantissement de moins en moins cachées de nos ennemis. Il est très difficile de se sortir de cette approche. Les mises en garde ne provoquent tout au plus qu'un haussement d'épaules et un agacement, et il faut un véritable électrochoc pour s'en remettre.

Le retour à la réalité

Donc, les troubles du 7 octobre ont tenu lieu pour beaucoup d'électrochoc, de réveil.

J'ai suivi avec beaucoup d'intérêt l'entretien de Roni Gelbfish, membre du kibboutz Bror Hayil, de la région de Sdérot, sur la chaîne «Pourparlers» (הדברות)[2]. Voici succinctement ce qu'elle dit :

«J'ai grandi dans l'idée d'un humanisme qui voit tout le bien qui est en l'homme, un humanisme qui ne connaît pas de frontières, de religion ni de foi. Nous avions une religion, celle du travail de la terre. Notre idée voulait que si vous êtes bon avec tout le monde, ce bien vous reviendra en retour.» Elle raconte que dans sa jeunesse, elle partait à la plage d'Ashkelon ou de Gaza, que ses parents achetaient des souvenirs au marché de Gaza. «Nous avons fait connaissance avec des gens. Certains sont venus travailler chez nous, et certains sont même devenus nos amis».

Ils étaient convaincus que le mouvement de la Paix maintenant incarnait la juste marche à suivre. Sa famille a fait l'armée, dans des unités combattantes. Son père, blessé grièvement en 82 à la guerre du Liban, y a perdu ses deux jambes. Il n'a jamais cessé de croire dans la paix. Elle parle aussi du parcours politique de sa famille, des partis Ratz, Mapam jusqu'à Meretz.

«Vers vingt ans, je vivais avec un conjoint arabe, et nos deux familles s'entendaient très bien. C'est une famille arabe israélienne de Arara. Nous y avons vécu un moment ensemble, puis à Tibériade. J'ai vécu chez ses parents à Arara pendant près d'un an.» Elle souligne le caractère non-religieux de cette famille arabe. Malgré son côté idéologique convaincu, elle relève un élément déterminant : «Quand j'étais avec Ashraf, ils nous ont dit… ses parents, son père, qu'il n'était pas certain que nous pourrions vivre dans le pays… Pas question pour moi de quitter Israël. Ça a été décisif dans la rupture de notre lien. »

Elle cite en outre sa grand-mère, née en Hongrie et rescapée de la Shoah, qui lui disait : «Les Arabes ici, c'est comme les Allemands là-bas. Si on leur en donne l'occasion, ils nous feront ici ce que les Allemands nous ont fait là-bas, et ce que les Hongrois nous ont fait.[3]» Roni ajoute : «Ils ne veulent pas de nous ici. Ils le disent, exactement de la même façon que les Allemands le disaient. Simplement, je ne voulais pas l'écouter. Je disais que c'était juste les plus extrémistes. Elle me disait que non.»

Elle raconte que sa famille n'éprouvait aucune aversion pour les Juifs religieux. Elle-même allait prendre son repas du Chabbat chez des voisins, avant de rentrer chez ses parents regarder la télé. Elle a pour finir épousé un Juif religieux, Yoav. Ils ont trois enfants, un religieux, et deux autres qui se définissent comme laïcs qui chérissent la religion.

«Nous sommes très juifs dans ma famille», conclut-elle. Quant aux troubles du 7 octobre, elle établit : «Nous avons eu une journée de Shoah. C'est au troisième événement filmé que j'ai visionné que quelque chose en moi a fait que tout a changé. Ça a commencé par un silence total qui s'est emparé de moi. Ça a duré vingt-quatre heures. Je tournais en rond dans la maison. Puis j'ai dit à mon mari : "J'ai compris". Le narratif gauchiste qui considère que tout homme est bon est faux. Certaines cultures entretiennent la haine et le mal et la violence. Pour certains, ce n'est pas seulement légitime, c'est admirable. Je m'en veux pour toutes les occasions où je n'ai pas compris. Je rencontre des gauchistes (sic) qui en sont revenus avant moi. J'ai parlé avec quelqu'un qui a recouvré ses sens avec les autobus d'Oslo[4], puis avec un autre que la famille Vogel[5] a réveillé.  

Ça a été son moment. Chacun a son moment. Ils m'ont tous dit : "Ne regarde pas en arrière. Simplement, quand vient le moment où tu comprends, dis juste merci. Ne pas mourir idiot. Il faut comprendre ce qui change. Qu'est-ce qui change ? Tout… Ce que je comprends, c'est qu'Israël ne devra jamais déposer les armes. Ce que je comprends, c'est que nous n'avons pas retenu les leçons de la Shoah. À huit ans, nous avons vu dans nos manuels scolaires les montagnes de cadavres, mais nous n'en avons tiré aucun enseignement. Ce n'est pas la gauche, c'est l'Etat d'Israël. Ceux qui le comprenaient n'agissaient pas comme si leur vie en dépendait. Chaque fois qu'il se passait quelque chose, nous avons tous encaissé[6]. Ce n'est pas la gauche ou la droite, nous avons toujours tout encaissé. ».

D'autres témoignages sont diffusés dans les médias. En voici un autre. Tzufit Grant est actrice et présentatrice TV. Elle raconte[7] l'exaspération qu'avait provoquée Daniella Weiss, membre active des implantations juives en Judée-Samarie, quand elle lui avait dit que la mère arabe était différente de la mère juive, car la mère arabe veut plus que tout que son fils finisse martyr. Pour elle, c'étaient des préjugés irrecevables. Quant à la tragédie de la famille Vogel massacrée par deux jeunes arabes, elle en avait longtemps fait totale abstraction. En revanche, elle admire aujourd'hui le public orthodoxe qui ne veut pas rester à l'écart, et elle participe avec eux à des actions de bénévolat en faveur des soldats et des habitants de la région limitrophe à Gaza.

Le site Srouguim lance une véritable série de témoignages sous le titre : «Les voix du dessillement»[8].

Cette mobilisation sans précédent, ce dessillement de l'intelligence massif va-t-il trouver une oreille attentive auprès du gouvernement ? Il est permis d'en douter, et de se demander à quels impératifs ou autres forces il obéit, puisqu'il ne semble pas suivre l'avis du peuple que l'on tente d'influencer en l'attendrissant.

Piège sans possibilité de faire machine arrière

Le peuple avait voté pour les pourparlers avec les ennemis. Ce fut ainsi que Rabin et Pérès prirent la place de Shamir aux commandes du pays. Mais quand le peuple comprit soudain qu'il s'était fait duper, il tenta sans succès de redresser la barre : le suivant, au lieu de mettre à mal ses prédécesseurs, paracheva leur programme. Comme il ne valait guère mieux que les autres, il fut à son tour balayé, ce qui évita que la Golan ne fût cédé aux Syriens par le subterfuge inspiré de ses concurrents politiques : mener les pourparlers en secret avant de mettre la Knesset au pied du mur. (Oslo avait pris les parlementaires au dépourvu, beaucoup résistèrent, mais deux novices en politique ne purent s'opposer à la tentation corruptrice : Goldfarb et Séguev furent flattés par des cadeaux). Seulement, comme le suivant ne fut pas plus défenseur de son pays, ayant retiré Tsahal du Sud-Liban, il fut désavoué à son tour. Le peuple, remis de la tentation des territoires contre la paix désigna alors Sharon à 70% des suffrages. Mais le peuple ne décidait plus. La même politique d'abandon de terres au profit de l'ennemi s'intensifia. Jamais, à ce jour, le peuple d'Israël ne s'est libéré de l'erreur qu'il avait commise en désignant les messianistes laïcs ou les faux prophètes dont la paix signée devint apocalyptique.

L'alternance droite/gauche ne change rien. Les élus n'obéissent pas au peuple. Le peuple les élit puis ils se soumettent à d'autres mentors.  

Cela fait dix-huit ans que chaque intervention militaire d'Israël à Gaza ne va pas jusqu'à la victoire mais annonce un autre sursis, une période de quelques mois pendant lesquels les civils israéliens sont provisoirement épargnés.  

Nous en sommes témoins, les cessez-le-feu n'entraînent que des trêves de plus en plus courtes et qui se terminent d'une façon de plus en plus violente.

Le Hamas, de mal absolu, d'ennemi à éradiquer coûte que coûte car il a permis cette journée de Shoah, aidé après coup des Américains, use et abuse contre tout un pays des effets psychologiques du syndrome de Stockholm. Au lieu de se fâcher de la rafle des enfants juifs, on est tout contents qu'ils nous les rendent au compte goutte. Pour un peu, on serrerait dans nos bras celui que Netanyahou venait de signaler au Mossad comme cible à abattre.  

Le grand réveil, le dessillement des yeux et des cerveaux de la frange la plus radicalement prompte à diviser le pays, ceux qui disaient encore il y a peu «Non, vous n'êtes pas nos frères», ce sursaut immense et prometteur annonciateur d'un changement profond ne sera-t-il pour finir qu'un sursis, un sursaut qui fait flop ?

 Prions pour que les arcanes du pouvoir, ceux qui en tirent les ficelles, ne puissent plus compter sur ceux qui, à l'instar de l'auteur et peintre Roni Gelbfish, susnommée, servaient leurs intérêts dissonants, et que toute cette classe politique qui nous veut peut-être du bien mais n'agit pas en ce sens, soit remplacée par de véritables délégués du peuple d'Israël. 

 

 

[1] Allusion aux théories du livre de Fukuyama La fin de l'histoire… qui a fait beaucoup d'émules dans les classes politiques dirigeantes.

[3] 4'20" sur le film.

[4] Explosions provoquées par les attentats-suicides qui ont fait jusqu'à 30 morts et plus à chaque tragédie.

[5] Famille juive égorgée chez elle un vendredi soir, dont un bébé de quelques mois.

[6] Le terme employé (הֵכַלְנוּ) signifie littéralement contenu, admis dans la retenue.

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