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2 mai 2024 4 02 /05 /mai /2024 12:52
Un commandement facile, simple et peu coûteux : une cabane

1 Allégorie midrachique

Nous pouvons lire dans le traité Avoda Zara du Talmud (3a), que le Saint béni soit-Il, à la fin des temps, proclame, dans un futur retransmis au présent de narration : «Que quiconque a observé la Torah vienne toucher son salaire». Un vent de protestation, d'indignation et de révolte secoue les nations, qui se sentent lésées. Contrairement à Israël, elles n'ont pas reçu la Torah, ce qui est pour elles insupportable.

Pourtant, comme le précise ce Midrach (idem 2b), les nations avaient dès le départ reçu d'office les sept lois noa'hides, bien qu'elles n'eussent pas jugé bon de s'y conformer. Puis le texte poursuit : elles avaient aussi par la suite refusé la Torah, en se fondant sur le verset qui rapporte qu'elle avait «brillé à partir de Séir pour eux et était apparue du mont Paran» (Deutéronome XXXIII, 2). Rachi explique l'interprétation de ce verset en marge du traité Baba Kama 38a, où il est également cité.[1]

Néanmoins, les protestations sont fructueuses, tant et si bien qu'une dernière chance leur est donnée (Avoda Zara 3a). Les Nations se voient offrir le commandement du séjour dans la soucca, cabane ou tabernacle, à l'instar d'Israël qui célèbre chaque année, cinq jours après Kippour, la fête de Souccot. Elles se mettent à l'ouvrage avec empressement, persuadées de battre Israël sur son terrain. Mais une chaleur épouvantable y rend leur séjour insupportable. Chacun se met à frapper sa cabane d'un grand coup de pied avant de réapparaître au grand air. Le geste est si abject que le Midrach lui rapproche le verset : «débarrassons-nous de ces chaînes et jetons ces carcans!»[2]

Pourtant, comme si de rien n'était, les nations viennent réclamer leur dû. Mais de quel dû parlent-elles puisqu'elles ont échoué à l'examen ? Elles se font vindicatives et revendiquent leur salaire, arguant que précisément en ce qui concerne ce commandement, Israël en est dispensé si les conditions météos en rendent la pratique difficile : «Celui qui est incommodé est dispensé de la soucca!» Rava explique (idem 3b) : «Il en est dispensé, mais qui a dit qu'il devait y mettre des coups de pied?» Puis : «Celui qui siège dans les cieux rira, l'Eternel se rira d'eux»[3].

2 Temps d'aujourd'hui et analogie midrachique

L'humanité n'aime pas les crimes contre l'humanité. Si on y réfléchit, elle n'aime pas après coup les crimes inhumains perpétrés par elle-même, et tout particulièrement le génocide juif de la seconde Guerre mondiale. Vu sous cet angle, la Shoah est un crime de l'humanité contre le peuple juif. Comme l'Espagne à l'époque de l'Inquisition, accuser, arrêter, condamner, exécuter des Juifs ne dérange pas l'humanité lorsqu'elle se trouve au beau milieu du feu ou de l'autodafé de l'action. Tel un ivrogne qui se remet des effluves et autres effets néfastes de son vin, ce n'est qu'après coup que l'humanité éprouve des remords. Juan Carlos a demandé pardon au peuple juif au nom de l'Espagne 500 ans après l'Inquisition, Jacques Chirac reconnaît la responsabilité de la France en un peu moins de temps, 50 ans après, pour le régime de Vichy, les rafles et la déportation. L'Europe ne cesse de faire son mea culpa, de se mortifier, de s'accuser… D'accord, le principal fautif était l'Allemagne, même si elle a motivé et réactivé notamment les vieux démons de la Pologne à l'Ukraine ; d'accord, même en Allemagne, c'étaient les nazis, dont beaucoup ne prirent aucune part aux exactions… Mais comment a-t-on pu se faire complice, ou même seulement laisser faire et se taire?

Quiconque osera minimiser, relativiser, prétendre replacer la Shoah dans son contexte, et c'est l'indignation générale! Le 6 fév. 90, en plein direct, un participant d'un débat télévisé demande une minute de silence pour les victimes allemandes. Il suinte la compassion pour les victimes non-impliquées de Dresde, Berlin, pour les populations de Sudètes déplacées de force[4]. Indignation et consternation vont suivre, et on ne tournera pas la page tant que l'on n'aura pas tout fait pour comprendre comment un tel spectacle navrant a pu être offert par une chaîne du service public, et tant qu'on n'aura pas pris toutes les mesures possibles aussi bien contre cet individu que contre tout autre potentiel intervenant indigne brisant ce tabou du discours admissible. Mais comment réparer le passé ?

3 Ultime et unique occasion de rattrapage

Or voilà que l'histoire offre aux nations de l'Occident une chance de rachat. Cette fois, de nouveaux intervenants endossent les anciens rôles. Les occupants musulmans de Gaza procèdent, au petit matin du 7 octobre 23, à leur génocide juif. En moins de six heures, ils assassinent ou kidnappent près de 2000 Juifs ou pris pour tels. Très rapidement, l'armée génocidaire dépasse largement la ligne des kibboutzim et envahit les rues des premières villes du Néguev, Sdérot, Nétivot et Ofakim. Mais heureusement pour les Juifs dans ce malheur, 2023 n'est pas 1943, et leur résistance n'est plus seulement symbolique comme à Varsovie. Ils stoppent les nouveaux trains de la mort, renversent la vapeur. Signalons au passage que l'intérêt nouveau pour de nombreux Juifs de l'étranger n'est pas paradoxale, car ce n'est qu'en Israël que le Juif peut non seulement se défendre mais aussi infliger de cuisants revers à ses agresseurs.

Cette mise à jour ou répétition de l'histoire offre une occasion en or à cet Occident pénitent de purifier son âme endolorie par le remord. On ne lui demande plus de se battre contre l'occupant nazi au péril de sa vie, d'opposer un lourd contrepoids probablement téméraire contre un Troisième Reich surarmé et ô combien destructeur. Il lui suffira pour s'acquitter de son devoir d'un tout petit engagement, léger comme une cabane réduite et provisoire.

Des centaines d'innocents ont été capturés telles des bêtes de foire, le temps presse, et l'Occident a les moyens sinon de faire directement pression sur le monstre kidnappeur du moins de soutenir Israël dans son effort pour les ramener chez eux.

Dans le fond, le Hamas n'est pas moins inhumain que le nazisme, leurs doctrines génocidaires à l'égard des Juifs se rejoignent. Mais sous la forme, la lutte morale qui s'impose contre cet ennemi de l'humanité est bien moins coûteuse en moyens matériels et militaires ou en vies humaines pour l'Occident.

Malheureusement pour l'Occident, il laisse passer sa chance et à nouveau l'humanité se ligue dans un nouveau crime contre le peuple juif. Que l'Occident ne prétende pas qu'il serait incapable de sensibiliser l'opinion au sort d'êtres humains enfermés dans les pires conditions. Quand Carton et Fontaine, diplomates français en poste au Liban, sont enlevés en 85 par d'autres agresseurs du même culte que l'occupant de Gaza, quelle coïncidence, le premier titre de tous les journaux télévisés de l'Hexagone, sur Antenne 2, affichent inexorablement leur photo et le compteur des jours de leur calvaire, sans jamais renoncer, et ce trois années durant.

Que d'émeutes – les minutes de silence sont moins en vogue aujourd'hui – que de gémissements pour cette pauvre population totalement dédouanée de ses agissements, pour tous ces non-impliqués, qu'il faut à tout prix épargner, car la vie des Juifs captifs ne saurait être un casus belli, tant d'intellectuels théâtraux et immoraux venant expliquer à leurs ouailles de plateaux TV que la vie d'un otage juif ne vaut pas plus que celle d'un néo-habitant de Dresde ou le déménagement vers d'autres contrées ou tout simplement l'Égypte, de tous ces néo-Sudètes de la bande de Gaza.

Et au lieu d'exiger que pas un gramme de nourriture ne soit acheminé vers Gaza jusqu'à la libération du dernier otage d'Israël, on les gave, comme pour leur dire : «Ne vous inquiétez pas, vous pouvez garder les otages, vous ne mourrez pas de faim». Comme le crime devient payeur, quand les Américains leur construisent un port maritime! La moitié de l'Afrique et le Sahel, par contre, peuvent bien mourir de faim, car ils ne présentent aucun intérêt justificateur contre les Juifs. D'ailleurs, il est hors de question de faire passer par la mer des embarcations surchargées de migrants de Gaza vers Lampedusa, ça épuiserait l'argument antisémite.

Le Midrach continue et présente les Perses, les Romains, etc., prétendre avoir construit des villes, des marchés et des ponts pour se mettre au service du peuple d'Israël. Mais tout cela est réfuté d'un revers de la main. Si Hitler et le nazisme ont été anéantis, s'il fut hors de question de négocier ou de parvenir à des compromis, ce n'était pas pour les Juifs mais pour le confort et la sécurité des autres nations de l'Occident. La preuve : ce monde civilisé refuse à Israël le droit d'anéantir ce nouveau nazisme et veut non seulement l'obliger à négocier avec les pires monstres de notre temps, mais à capituler devant leurs exigences.

Le monde occidental, en inversant les rôles et en accusant les dirigeants d'Israël de crimes contre l'humanité, perd son ultime chance de rachat de son âme, en ruant et donnant des coups de pieds dans tous les sens.

Il semble que nous assistons à la dernière étape des prophéties imagées du livre de Daniel. Les pieds de la statue dont chaque niveau figure une époque et une civilisation dominante qui finit par s'écrouler, composés d'argile et d'airain qui ne peuvent fusionner, incarnent l'association bancale de l'Occident laïco-chrétien et de l'Orient fanatico-musulman ; à la différence près que si on pensait à une coalition entre pays de ces deux tendances, le mélange se produit à l'intérieur même des pays de l'Occident, qui doivent naviguer pour gérer l'électorat et la poudrière de l'Orient qui occupent ses villes et ses rues, comme au Michigan américain.

 

 

 

[1] Séir fait allusion à l'Occident, et Paran aux Arabes. Dans le Midrach Sifri, Devarim, § 343, il est écrit : «Lorsque le Saint béni soit-Il apparut pour donner la Torah à Israël, ce fut en quatre langues : "du Sinaï", c'est la langue hébraïque ; "… brillé du Séir pour eux", c'est en langue romaine ; "apparut du mont Paran", c'est la langue arabe ; et "vint de Rebabot Kodech", c'est la langue araméenne.»

[2] Psaumes II, 3.

[3] Psaumes II, 4.

[4] 6 fév. 90 : pendant l'émission «Ciel, mon mardi!» de C. Dechavanne sur TF1,un certain Olivier Mathieu demande une minute de silence «à la mémoire des 14 millions d'Allemands qui ont été déportés en 1945-1946, deux millions de morts…»

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