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14 octobre 2020 3 14 /10 /octobre /2020 20:55

J'avais lu ce roman d'anticipation pessimiste de l'installation d'une dictature sournoise liberticide. En cette deuxième année de restrictions des droits élémentaires de l'humanité, de mouvement, de réunion, de loisirs et aussi de culte, il apparaît que les prédictions imaginaires les plus folles ne sont pas les plus irréelles. Quel que soit le prétexte imaginé par l'auteur de science fiction, ce dernier aura néanmoins raison à coup sûr à l'endroit d'une seule caractéristique constante : la recherche supposée du bien de la société et/ou de l'individu qui évolue en son sein par le pouvoir.

Les composantes les plus banales ou incontestables de notre vie sont démolies, mais le plus inouï, ce n'est pas le côté coercitif insensé des mesures imposées par le pouvoir, mais bien la docilité des peuples à neutraliser voire annihiler leur cerveau parce que quelqu'un quelque part sait mieux qu'ils ne le savent eux-mêmes ce qu'exige leur survie.

Rien n'est plus préoccupant que de voir l'homme libre se faire priver de tous ses acquis non seulement sans broncher mais en se contraignant tout seul. Et qu'importe que les directives s'agitent en tous sens comme une girouette livrée aux caprices d'un vent  instable, qu'importe que le pouvoir tente tout et son contraire. Le citoyen avili comprend, accepte, voit en ces tâtonnements non pas une restriction croissante de sa liberté mais la recherche de la solution la plus efficace pour le protéger.

La logique est absente. On vous enferme à cause d'un virus dont vous seriez l'éventuel porteur. On joue sur votre sentiment de solidarité humaine. Comment, vous seriez responsable d'une hécatombe? Et pour prévenir toute tendance égoïste de votre part, on fait de vous un hypocondriaque prêt à ne sortir de chez lui qu'en scaphandre. Sans confinement, vous effraie-t-on, chaque pays perdra en un temps très court cinq cent mille habitants.

Les confinés meurent par milliers. On nous laisse entendre : «Qu'est-ce que ça aurait été si on nous avait laissé circuler librement?» Les hommes et femmes pour qui la force de l'âge est un lointain souvenir sont abandonnés à leur sort. Ils meurent dans l'isolement, sans leurs proches ni parents, privés de nourriture et de soins. Les traitements qui prolongeaient leurs jours sont brutalement suspendus. Les cortèges funèbres, les mariages, les réunions familiales, tout rassemblement humain est interrompu par des commandos policiers qui mettent à terre à coup de matraques hommes, enfants, femmes, vieillards. Personne ne s'en indigne, ce sont des assassins. Sus aux assassins, à ces inconscients qui mettent l'humanité en danger, qui se proposent pour propager la peste et décimer le monde. Eux qui pourtant dans la joie s'engageaient à perpétuer l'espèce. On les plaque au sol, on les arrête, quelle folie les a donc inspirés de ne pas s'être bâillonnés!

Les spécialistes alarmistes mettent en garde : annuler les mesures verra la létalité monter en flèche. Mais il faut bien remettre en route le mouvement, sans quoi la société mourra. On libère pour voir et rien de ces prophéties mensongères ne se passe. Qu'importe. Les scientifiques qui préconisent tel traitement pourtant efficace sur le terrain, ceux qui, sinon preuves du moins théories à l'appui, montrent que tuer la liberté n'endigue pas le fléau, ou qui lui rendent ses véritables proportions, sont montrés du doigt, passent en conseil de discipline.

Si vous êtes atteints, restez chez vous. Si vous pensez l'être, rendez-vous en transports en commun au point de dépistage le plus proche. Mais surtout, gardez vos distances et vos masques!

Rien n'est plus périlleux que l'homme qui s'auto-saborde. Faire en sorte qu'il se retourne contre sa propre personne, contre sa prospérité et sa descendance, tel est l'impératif d'un totalitarisme propre. Le vieillissement de l'Europe a été programmé au moment de la guerre froide. Cette Europe génératrice de guerres mondiales n'a pas été stérilisée largement par ses différents gouvernements mais par la population en soi qui a tenu le raisonnement suivant : puisque la planète est vouée à sauter à plus ou moins brève échéance, autant profiter de la vie tant qu'il en est encore temps, mais quelle gabegie que de mettre au monde une génération qui verra à coup sûr cet apocalypse!

La guerre froide est passée mais le visage de l'Europe souffre gravement des séquelles de l'aliénation stupéfiante d'antan.

Sur un point cependant, Israël ne s'est pas aligné sur les avis ou directives vues en Europe. La liberté de culte a subi un terrible revers. En France, la pureté familiale a été interdite. Pour le judaïsme authentique trois fois et demie millénaire, fermer les bains purificateurs revient à stopper la procréation. Pas de mikwé, pas de naissances. Ces victimes de la psychose collectives sont étouffées dans l'œuf ; elles n'auront pas même connu de vie embryonnaire. Israël a pris d'énormes précautions, mais la chaîne de la vie n'a pas été interrompue.

Sur ce qui semble moins essentiel, la situation est bien moins reluisante. Qui aurait seulement pensé il y a un an que les synagogues seraient fermées pour Kippour 5781, non pas par des antijuifs ou des antireligieux mais par les plus hautes autorités compétentes? Le monde à l'envers, c'est maintenant. La première règle du Choulhan Aroukh, le Livre des Lois, considère que ce n'est pas au matin de réveiller le Juif mais au Juif de réveiller le matin, de se lever avec empressement pour le culte de son Créateur. On nous cite des contre-indications en les sortant de leur contexte. Les règles applicables en situation de danger de vie. Il est impératif de profaner le Chabbat pour secourir un individu qui risque sans soins de mourir. On mange non cachère si on est perdu dans un désert pour ne pas mourir de faim. Mais voilà que l'on nous cite des passages entiers de directives à suivre en période d'épidémie, tirées des responsas des plus grands auteurs de notre histoire, à observer impérativement quand des hommes sains s'écroulaient agonisants dans les rues, quand chacun se demandait s'il serait encore là demain.

Dans les années catastrophiques du contexte des accords d'Oslo, le pouvoir s'est fait dictature. Il a importé le terrorisme et l'a installé en nos frontières. Il nous a fait découvrir en même temps qu'il l'a lui-même découvert l'attentat suicide, la métamorphose atroce de paisibles cars en fours crématoires. La composante persistante de la haine antijuive du tandem Hitler-Hadj Amin Husseini a repris sa place d'ange de la mort présent à chaque coin de rue. Des écoliers qui partaient cartable au dos ne pouvaient être identifiés que par analyse Adn. Des hommes et des femmes qui ne demandaient qu'à vivre en paix étaient assassinés par de lâches tueurs embusqués. L'enseignante Sarah Licha, la mère et l'enfant Ita et Ephraïm Tzour ont été assassinés, fusillés dans leur voiture, et ne sont malheureusement que quelques exemples.

Mais le peuple était solide, déterminé, sûr de son droit. Les dirigeants spirituels les épaulaient, les encourageaient, et surtout les approuvaient. Il fallait résister, continuer à répandre la vie, répondre à chaque tuerie de Juifs innocents par de nouvelles rues, de nouvelles localités, encore plus de jardins d'enfants et de maisons d'étude. Le peuple ne pouvait rien contre les fiefs d'où sortait le fléau, le gouvernement leur avait donné l'autonomie. Mais le peuple faisait preuve d'une merveilleuse résilience.

Nous étions malgré nous en conflit, jetés dans une guerre non conventionnelles, où un ennemi lâche et inhumain frappait avec prédilection les civils, avec un penchant particulier pour les femmes et les enfants. Les tueurs arabo-musulmans introduits dans la chaîne de montagne de Jérusalem nous montraient que la monstruosité des tireurs ukrainiens de Bergen-Belsen existait toujours. Mais nous devions nous battre, nous le faisions sans armes, il nous était interdit de capituler. Il est difficile de dire aujourd'hui si nous avons gagné. L'ennemi est potentiellement toujours menaçant. Il est toujours là, et le retour à Sion, en ce qui concerne les terres libérées à la guerre des Six jours, n'ont toujours pas le statut officiel israélien, ce qui permet à un ennemi de l'intérieur d'exploiter les vides juridiques à des fins néfastes et destructrices. Mais ce qui demeure cependant certain, c'est que l'ennemi n'a pas remporté la victoire. Nous n'avons pas déserté les lieux, nous avons renforcé notre présence, étendant et démultipliant en dépit de tout les régions où il fait bon vivre. Et surtout, comme le montre l'expérience désastreuse et irresponsable de l'expulsion des Juifs de Gaza, Jérusalem et Tel-Aviv ne sont pas sporadiquement pilonnées par des missiles, brûlées par des cerfs-volants incendiaires, menacées par des intrusions par des tunnels.

Certes, on avait fait dire à une importante autorité rabbinique que la terre d'Israël pouvait être abandonnée à l'ennemi en cas de danger de vie, mais elle avait rattrapé le tir en affirmant que les «partenaires» n'étaient pas dignes de confiance.

Alors, faut-il se battre ou protéger sa vie? Cette question est corrompue, car souvent c'est en se battant que l'on préserve sa vie. Ne pas envenimer les choses, ne pas répondre, accepter des compromis, sont souvent interprétés comme un appel à encore plus de concessions, en route pour une capitulation totale et mortelle. Les Juifs de Palestine ont choisi de s'armer, de se défendre et de se battre. D'aucuns ne voyaient pas d'un bon œil leur refus de se laisser exterminer, et les ont qualifiés cyniquement de terroristes. Mais leur résistance nous permet aujourd'hui de vivre ici.

Il n'en demeure pas moins que nous prions pour nos soldats, car il est indéniable qu'ils se mettent en danger en assurant pour nous la paix et la vie.

La tradition n'exige en dernier recours d'opter pour la mort que dans trois cas de figure, ceux où il faudrait transgresser l'une des trois interdictions capitales : l'idolâtrie, verser le sang ou la corruption des mœurs. Pourtant, les plus grands sages d'Israël ont étudié et enseigné la Torah en public quand les Romains en décrétèrent l'interdiction sous peine de mort. Le grand rabbin Isaac Pérez, ministre en fonction de la XIIème Knesset, fit en son temps une conférence afin de faire le l'ordre dans cette question.

Dans quels cas de figure est-il impératif religieusement de transgresser un interdit pour sauver sa ou des vies, et dans quels autres cas convient-il de se battre pour rester observant coûte que coûte? Le fin mot de l'affaire, c'est que tout dépend de l'essence du danger. Ce qui fait toute la différence, c'est le cas où une autorité hostile, collective ou individuelle, cherche à empêcher Israël d'observer un (ou des) commandement(s), ou à imposer une conduite visant à effacer le caractère particulier d'Israël, auquel cas on se battra «jusqu'à la lanière du soulier».  

Donc, la question est la suivante : si je ne vais plus à la synagogue depuis le Chabbat qui a suivi Pourim 5780, est-ce pour ne pas attraper ou transmettre un virus qu'on a décrété inguérissable ou parce que le pouvoir m'en interdit l'accès?

Attention! Ne voyez pas ici un appel à une guerre fratricide. Après tout, qu'il pleuve, qu'il vente ou qu'il fasse quarante, je me joins depuis lors à l'office de ma rue. Et puis, pour Kippour, le gouvernement a finalement autorisé la prière à la synagogue. Ce que je veux dire, c'est que si c'est un décret général sans but ni efficacité sanitaires précis, nous aimerions entendre une voix plus déterminée de nos dirigeants spirituels, afin qu'ils fassent valoir nos droits légitimes, non sans accepter s'il le faut vraiment certaines précautions, et que nous ne nous retrouvions pas, ce qui fut le cas, dans une sorte de couvre-feu précisément pendant la période des solennités traditionnelles : Roch Hachana, Kippour, Souccot.

Pour finir, je me permettrais de rapporter quelques éléments vécus qui me laissent au minimum sceptique. Fin février, on a appris publiquement (médias, discours politiques, apparition d'un responsable sanitaire nationale gouvernemental) qu'on venait de nous importer d'Italie un virus venu de Chine. Il fut rapidement question d'un confinement. Logique. Mais alors, pourquoi a-t-on permis à ce virus de circuler pendant encore deux bonnes semaines?

Le Chabbat d'avant Pourim, on nous a demandé fort peu civilement de nous retrouver à moins de cent fidèles dans des synagogues en contenant couramment plus de trois cents. Le dimanche suivant, donc le lendemain soir, je suis allé à un mariage en salle, à Jérusalem, avec plus de quatre cents invités, dont une sommité rabbinique, le Rav Druckman. Ils venaient d'un peu partout dans le pays. Personne n'a transmis ni attrapé le virus. Après une première période de privation de nos libertés, et un retour pressenti progressif à la normale, je me suis rendu à un autre mariage, à Bétar Ilit. Là, il y avait des masques, mais ils sont tombés pour le repas des noces. Encore une fois, aucun cas n'a été signalé. Alors, miracles répétitifs ou intox?

Voilà, c'est à peu près tout.

 

   

 

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